Henriette d'Angeville, Muse de poête
Poème dédié à Mademoiselle Henriette d’Angeville sur son ascension au Mont-Blanc.
Par Jean Baptiste Antoine Aimé de Pongerville de l’Académie française.
La terre, jeune encor, centre de feux brûlants,
En liquides brasiers les vomit de ses flancs
Ces rochers, vastes monts, que ses efforts soulèvent,
Par le temps entassés, ils se dressent, s’élèvent,
Et semblent envahir, géants audacieux,
L’intervalle infini de notre globe aux Cieux.
De leur sublime horreur vous repaissez vos yeux ?
Ni des rocs suspendus l’incessante menace,
Ni les flots endurcis d’un océan de Glace,
Ni les sentiers ardus sur le gouffre inclinés,
Rien n’arrête l’essor de nos obstinés.
Le charme du péril noblement vous enflamme,
Vous montez où jamais ne parvint une femme !
Là, du ciel les secrets vous sont ils donc ouverts ?
Non. Mais quand vos regards tombent du haut des airs :
Ces remparts, ces palais, ces cités opulentes,
Ces demeures de pourpre et d’or étincelantes,
Ces temples somptueux, leurs altiers pavillons
Décroissent abaissés au niveau des sillons.
Sur le globe amoindri tout se confond, s’efface ;
De l’homme inaperçu rien n’indique la place.
Atome passager sous la poudre agité,
L’homme pourtant s’admire ; ivre de vanité,
Il se dit du très haut le plus sublime ouvrage ;
Et de subir son sort il n’a point le courage.
Egoïste envieux, il croit tout fait pour lui,
Souffres moins de ses maux que du bonheur d’autrui.
Son cœur couve à la fois l’orgueil et la faiblesse ;
S’il n’est pas aux premiers rangs toute grandeur le blesse ;
Il veut l’égalité, mais rebelle au devoir,
Dès qu’il faut obéir il insulte au pouvoir.
Tout désastre lui plait, il convoite avec joie
La chute de l’état, s’il y trouve une proie.
Ce poème est dédié à Henriette d’Angeville, « la fiancée du Mont Blanc », après son ascension du 03 septembre 1838. Ce texte non daté est signé par M. de Pongerville.
Mais qui est ce personnage ?
Jean-Baptiste-Antoine-Aimé Sanson de Pongerville est né le 3 mars 1782 à Abbeville et mort le 22 janvier 1870 à Paris.
Il est maire de 1807 à 1828 de Neuilly L’Hôpital, où il habite le château familial.
Il devient conservateur à la Bibliothèque Sainte-Geneviève en 1846 et à la Bibliothèque Nationale en 1851. Il est élu conseiller général du département de la Seine pour le canton de Courbevoie en 1860.
C’est un homme de lettres et poète de facture classique. Candidat à l'Académie française, il se retira devant Lamartine, puis est élu le 29 avril 1830 en remplacement du marquis de Lally-Tollendal et est reçu le 29 juin suivant par Jouy (fauteuil 31). Il soutient Victor Hugo contre Flourens à son élection, reçoit Mignet, et fait partie de la Commission du Dictionnaire.
Il traduit en vers Lucrèce, en prose Virgile et Milton. Ces œuvres sont aujourd’hui tombés dans l’oubli….
Je ne trouve aucun lien de parenté entre la famille d’Angeville et celle de M. de Pongerville.
Pourquoi a-t-il écrit ces vers ?
Serait-ce un précurseur de l’égalité Homme-Femme ou un fervent admirateur ?
Nous ne saurons sans doute jamais.